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26 mai 2013

Métèques et prostates

A l'occasion du décès récent du poète, chanteur et compositeur Georges Moustaki, le mot métèque est soudainement réapparu. Il a été cité à profusion dans tous les médias français en association avec le titre de sa fameuse chanson intitulée "Avec ma gueule de métèque".

Il est certain qu'à l'époque où nous vivons, le mot métèque ne peut être prononcé que par un troubadour de gauche, ou par référence explicite à lui, et dans un contexte de victimisation. Notons que l'immense Joey Starr en personne avait repris la chanson de Moustaki.

C'est pourtant bien à tort que métèque est orné d'une connotation péjorative. Un peu d'étymologie :


Métèque vient du grec ancien métoikos, formé à partir de metá (changement) et oîkos (maison). Ce mot signifie « celui qui a changé de résidence », celui qui n’est pas originaire de la cité dans laquelle il réside. Pour s'installer comme métèque à Athènes, l'étranger doit trouver un protecteur, le prostátês. Ce dernier doit faire inscrire son protégé dans un dème (circonscription administrative d'Athènes au début du 5e siècle avant J.C.). 

Combien d'entre nous sont donc - souvent sans le savoir - des métèques à Versailles ? Et combien ailleurs ? N'en déplaise à Joey Starr, ce qualificatif est d'une totale banalité. Du moins à l'origine.

D'où viennent les dérives sémantiques de mots décrivant simplement une réalité, tels que métèque, nègre, blanc, race, riche, discrimination, etc ? Il n'y a pas que l'ignorance et l'imbécillité. Le déni de la réalité et l'espoir de la gommer sont sans doute, avec la manipulation politique qui en tire parti, les ressorts essentiels de ces dérives. « La connaissance des mots conduit à celle des choses. » - Platon (encore un Grec). Changer un mot par un autre n'a jamais changé la réalité qu'il décrit. Bannir un mot par décret est d'une vanité encore plus grande.



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