Donald Trump ne fait pas encore autorité en tant qu'historien. Et il n'en prend pas le chemin.
A propos des célébrations en France du 80e anniversaire de l'armistice du 8 mai 1945, il a cru bon d'exprimer, le 15 mai devant ses soldats de la base d'Al Udeid au Qatar, son mépris et sa réprobation vis à vis des prétentions de la France en raison de la part insignifiante, selon lui, qu'elle a pris dans la résolution du conflit. Pour Trump ce sont les Américains qui ont gagné la guerre, les autres nations ont seulement aidé.
L'Amérique n'est entrée dans la 2e guerre mondiale qu'en 1941 après Pearl Harbor. Elle a certes produit une immense quantité de matériel militaire fourni aux alliés (programme Lend-Lease). Son rôle clé dans le débarquement de Normandie le 6 juin 1944 et dans la suite est indéniable. Son rôle de super puissance hégémonique qui s'installe dans l'après-guerre est un fait qu'on ne conteste pas. Le Plan Marshall de reconstruction n'a-t-il pas été un bienfait ?
Oui mais, pour ne considérer que le prix du sang versé, qui est un indicateur de l'implication, l'Amérique se range après la France. Dans ce macabre décompte c'est l'URSS qui, parmi les Alliés, a payé le plus avec 20 000 000 de morts, contre 600 000 pour la France et 400 000 pour l'Amérique.
Donald Trump qui n'est pas à une contre-vérité près, a également évoqué lors de sa harangue d'Al Udeid le "discours d'Hitler sur la Tour Eiffel", dont chacun sait qu'il n'a jamais eu lieu. Hitler n'a visité Paris qu'une seule fois, le 23 juin 1940, tôt le matin pour éviter le public, et pendant 3 heures seulement. Il a fait un tour express passant devant les monuments emblématiques mais il n'est pas monté sur la Tour Eiffel dont les ascenseurs étaient suspectés d'avoir été sabotés par la Résistance.
Le général Christophe Gomart, député européen, lors de sa conférence sur la géopolitique tenue à Montigny-le-Bretonneux le 22 mai dernier, a évoqué ces réalités et, en plus, a rappelé la position historiquement ambivalante, voire hostile, de l'Amérique vis-à-vis la France et de l'Europe, à rebours de l'idée prévalante d'une amitié historique indélébile. L'amitié et la reconnaissance nées de la Guerre d'Indépendance (1775-83) sont loin mais le mythe perdure. Le slogan trumpiste "America first" trouve des racines profondes. De Gaulle a été méprisé par Roosevelt et sauvé par Churchill. Trump est aujourd'hui obsédé par la Russie et la Chine. Il ne trouve pas d'intérêt à défendre l'Ukraine et l'Europe, qui ne sont que de la monnaie d'échange servant ses visées géostratégiques et surtout commerciales.