A Versailles et au Chesnay-Rocquencourt, comme dans tout le bassin parisien et ailleurs, de nombreuses maisons, notamment celles de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, sont en maçonnerie de pierre de meulière. Les façades sont toujours bien entretenues. En revanche, les murs de clôture donnant sur la voie publique sont souvent dans un état lamentable comme une déambulation au hasard des rues permet de le constater.
Les cas relevés résultent de travaux d'extension, de surélévation, de perçage d'ouvertures, de creusement de cavités pour installer compteurs et boîtes aux lettres dans des murs anciens, exécutés par des maçons peu soigneux, aux ordres de commanditaires peu exigeants et hors du contrôle des services de l'urbanisme et des architectes municipaux ou des bâtiments de France, pourtant si pointilleux sur bien des sujets ressortissant à leurs compétences. Les murs en question sont, dans les cas les plus graves, tartinés de mortier, parfois partiellement, noyant les moellons de meulière alors qu'il fallait soigneusement rejointoyer, en léger retrait de la face vue, et nettoyer à la brosse humide les débords de mortier sur la pierre avant prise du mortier.
Nous sommes consternés par le laxisme des autorités vis à vis de ces actes iconoclastes ou de vandalisme.
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mur en meulière parfait au 12 avenue Douglas Haig à Versailles |
Un cas exemplaire de belle maçonnerie est visible au 12, avenue Douglas Haig à Versailles. C'est un mur de soutènement au pied d'un terrain en pente et il sert de mur de clôture à la propriété. L'appareillage et les joints sont parfaits. Il s'agit d'un ouvrage ancien, auquel la qualité de son exécution confère la pérennité en plus d'un aspect esthétique irréprochable.
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détail du jointoiement |
Les photos suivantes illustrent la variété des murs en meulière, où le bon est plus rare que le mauvais. Par égard pour les propriétaires, les adresses ne sont pas indiquées. Ils sont rangés de haut en bas par qualité décroissante.
Versailles très correct
Le Chesnay, correct, mais pourquoi
un mortier couleur rose layette ?
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Versailles, horrible rafistolage |
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Le Chesnay, horrible tartinage
Géologie et histoire
L’appellation de pierre meulière se retrouve,
au-delà du Bassin Parisien, dans de nombreuses régions de France
et du monde : Jura, Haute-Savoie, Périgord, Ardèche, Chartreuse, etc.
ainsi qu’en Italie, en Chine, au Burkina Faso, aux Pays-Bas, aux
États-Unis…
Pierre
à meule, elle doit son nom à la fonction qui lui a été dévolue : cette «
pierre à pain » est en effet celle des meules qui broyaient les grains de blé. On dénombre plus d’une
quinzaine de faciès de roches sédimentaires siliceuses auxquelles on a attribué le
nom générique de meulière.
Exploités
jusqu’à la fin du XIXe siècle environ, 206 sites d’extraction ont été recensés
en France. Les blocs les plus denses, de couleur grise ou parfois blanche,
jaune ou gris-bleu, étaient destinés aux meules, tandis que, plus en surface,
les fragments rougeâtres ou ocre étaient retenus pour la construction.
La
géologie spécifique de l’Île-de-France a donné à cette roche rugueuse et
caverneuse une identité propre à notre habitat.
Les
gisements du Bassin Parisien s’étendent de la Normandie jusqu’aux abords
de Reims et d’Épernay, et se concentrent entre le Vexin, la Beauce,
le Hurepoix et la Brie. Une véritable industrie s’était développée à
La Ferté-sous-Jouarre en Seine-et- Marne, la capitale mondiale de
la pierre meulière. Les meules extraites dans ses carrières avaient
une dureté exceptionnelle et équipaient des moulins jusqu’en
Nouvelle- Zélande ! La carrière des Molières (ce toponyme n’a rien à
voir avec le nom meulière) a produit entre 100 000 et 200 000
meules en 700 ans d’exploitation. Les meules de la région
étaient acheminées jusqu’au port de Rouen pour être exportées
par vaisseaux.
Cette
roche dure et inaltérable est née d’une réaction physicochimique de
cimentation au début de l’ère tertiaire : sur la couche des sables de
Fontainebleau, le quartz s’est mélangé au calcaire déposé au fond du Bassin
Parisien par l’alternance de la mer et des formations lacustres d’eau douce.
Les pluies ont dissous le calcaire, ne laissant que la silice, minéral courant
le plus dur qui soit.
Non
gélive et résistante à l’érosion, on l’adopta très vite pour réaliser
fondations et enrochements de ponts. La Belle Époque a signé
l’avènement de ce matériau constitutif de villas bourgeoises. La
roche était alors encore relativement abondante. en effet,
les carrières de la région sont exploitées pour les pavés de grès
mais elles doivent d'abord extraire les couches à meulière avant
d'atteindre le grés.
Dans
notre région, les traces de son usage remontent à quelques
millénaires. Associée au calcaire et au grès, on retrouve la meulière
dans les vestiges de tumuli de l’âge du Bronze. À la période antique,
elle apparaît dans des aménagements de drainage observés à
Saint-Pierre-du-Perray (91). On la trouve appareillée et maçonnée
dans des monuments du second Moyen Âge, notamment les ruines de
l’abbaye des Vaux de Cernay, des églises du XII siècle… Ses qualités
esthétiques associées à d’autres matériaux sont mises en valeur à partir de la
Renaissance pour souligner certains traits architecturaux.
Source :
emprunt de passages de l’article de
Patrick Blanc extrait de l'Echo du Parc de Chevreuse n°66 (juin 2015)
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