10 août 2020

Lexicographie et exclusion numérique : le fléau de l’«illectronisme»

 

 

Rappel :

analphabétisme / illetrisme.  Ce ne sont pas des synonymes. L’analphabétisme peut être défini comme le degré zéro de la lecture et de l’écriture : Je ne sais pas, je n’ai jamais appris. L’illettrisme est une nouvelle réalité distincte de l’analphabétisme : J’ai appris, j’ai perdu, j’ai oublié

 

La novlangue vient de s’enrichir du terme illectronisme. Ce néologisme est visiblement calqué sur illetrisme. L’idée étant de créer un parallèle entre les handicapés du numérique au moyen d’un ordinateur et les handicapés de la lecture et de l’écriture avec du papier et de l’encre.

Le rappel en tête de ce texte pointe que, si l’intention est bonne, l’application est fautive car c’est sur analphabétisme qu’il eût fallu bâtir le néologisme, en référence à ceux qui n’ont jamais appris. Mais on voit bien que c’était plus difficile, voire impossible, d’obtenir un mot compréhensible.

Venons-en au fait (source Le Canard Enchaîné du 5 août 2020).

Pour acheter un billet de train, consulter son compte en banque, déclarer ses impôts, s’informer sur ses droits sociaux, réserver un service ou un spectacle, communiquer avec son assureur ou son fournisseur d’électricité, il faut se servir d’un ordinateur ou d’un smartphone. Pour un bon tiers, les Français sont handicapés par le manque de matériel, de réseau, de savoir-faire. Pensons aussi à ces personnes dont le conjoint s’occupait de tout et qu’un soudain veuvage rend brutalement inexistantes pour les administrations et services. Naufrage inévitable.

Que Choisir, dans une récente étude, évaluait à 12,8 millions le nombre des Français qui ne disposent pas d’un internet de qualité suffisante (incluant donc ceux qui n’en disposent pas du tout). Les opérateurs n’ont toujours pas rempli les obligations sur lesquelles ils se sont contractuellement engagés. Le président de la République fais des promesses, le président de l’ARCEP (autorité de régulation des téléphones) s’insurge. Sans grand résultat.

La navigation sur mobile reste poussive, surtout en zone rurale. Seulement 85% des abonnés de Bouygues, 82% d’Orange, 81% de SFR et 65% de Free parviennent à ouvrir leur page.

La fibre optique se déploie en priorité dans les zones urbaines denses où elle est rentable. Seul un quart des foyers en bénéficie.

Corollairement, il faut signaler le scandale des aides téléphonique payantes dispensées par la plupart des administrations, facturées 6 centimes la minute y compris les interminables minutes d’attente. C’est du racket. Quelques députés courageux oseront-ils un jour le dénoncer ?


Aucun commentaire: