19 octobre 2010

"Les aristocrates à la lanterne" - petite manif du 15 octobre

On ne peut même pas appeler cela une "manif".

La scène se passe vendredi 15 octobre peu après midi.

Le témoignage est recueilli de deux bourgeoises interloquées, l'une qui revenait du marché avec son panier en osier à roulettes, l'autre qui regardait par la fenêtre de la salle d'attente de son dentiste. Ces respectables Versaillaises, dont on ne doute pas qu'elles sont capables de décrire avec une grande précision une robe de mariée à peine entrevue, se sont en revanche révélées moins douées pour relater l'évènement qui suit.

Peu après midi, donc, une bande d'individus a déferlé rue du Maréchal Foch, en direction du centre ville. Les deux observatrices étaient positionnées grosso-modo entre la Maison Despagne et le boulevard de la Reine.

La bande était composée d'une cinquantaine - ou peut être plus - de jeunes qu'on se gardera bien de décrire pour ne pas risquer d'être traîné devant les tribunaux par le MRAP. Les dames ont dit qu'ils n'avaient pas tous l'allure du gendre idéal, ce qui est probablement un euphémisme et laisse aussi penser qu'elles n'ont vu que des garçons.

Il n'y avait ni pancartes ni banderolles. La bande avançait de manière tout à fait informelle en tapant sur le toit des voitures en stationnement et en vociférant, mais les dames n'ont perçu aucun message de revendication. Il s'agissait sans doute de communier avec la France en colère.

Le malheureux épicier de la Supérette Foch a vu son étal de fruits et légumes bousculé par quelques éléments non végétariens de la horde. De superbes gros oignons ont roulé devant les pieds de la dame du marché (voila le genre de choses qu'elle a bien mémorisées). Elle a voulu les remettre sur l'étal, mais, comme ils étaient endommagés, elle y a renoncé, laissant ce soin au gérant qui n'était pas visible.

La circulation s'est trouvée bloquée. Un monsieur, bien de sa personne paraît-il et conduisant une grosse voiture immobilisée, semble s'être fait subtiliser puis restituer sa veste. Il aurait eu une attidude ostensiblement courageuse - et peut-être téméraire - contrairement à tous les autres passants qui pressaient le pas, beaucoup entrant précipitemment chez Super U ou à la Poste, pris d'un soudain besoin de faire des courses ou d'acheter un timbre.

L'ordre républicain, ou tout au moins municipal, était défendu par deux pauvres ASVPettes. Elles étaient suspendues à leurs talky-walkies, ce qui, dans ce genre de circonstances, donne au moins une contenance et peut laisser penser qu'on est en relation avec le ministère de l'Intérieur qui va immédiatement dépêcher des hélicoptères de combat.

A défaut d'hélicoptères, on aurait apprécié que la brigade équestre de Versailles arrivât au grand galop pour disperser les galopins.

Que peuvent deux jeunes femmes même très courageuses et championnes d'arts martiaux contre une bande nombreuse d'énergumènes excités ?

Il sera intéressant d'en savoir plus dans la presse locale si la prochaine édition n'est pas annulée pour cause de grève. Qui étaient-ils ? D'où venaient-t-ils ? Ont-ils été pris et condamnés au knout ou aux galères ?

En tous cas, c'est arrivé. C'est arrivé à Versailles. L'expérience semble avoir été concluante pour les fauteurs de troubles. La prochaine fois, ils seront sans doute tentés de monter d'un cran. C'est une démonstration de plus des effets irrésistibles d'un rapport de forces complètement déséquilibré.

Que peut-on faire ?

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