31 juillet 2025

Murs de clôture en meulière - les reprises sont souvent très mal réalisées

A Versailles et au Chesnay-Rocquencourt, comme dans tout le bassin parisien et ailleurs, de nombreuses maisons, notamment les maisons bourgeoises du XIXe et du début du XXe siècle, sont en maçonnerie de pierre de meulière. Les façades sont toujours bien entretenues. En revanche, les murs de clôture donnant sur la voie publique sont souvent dans un état lamentable ainsi qu'on peut le constater en déambulant au hasard des rues.

Les cas relevés résultent de travaux d'extension, de surélévation, de perçage d'ouvertures, de creusement de cavités pour installer compteurs et boîtes aux lettres ou d'une tentative maladroite de réparation de joints dégradés, exécutés par des maçons peu qualifiés, aux ordres de commanditaires peu exigeants et apparemment hors du contrôle des services de l'urbanisme et des architectes municipaux ou des bâtiments de France. Les murs en question sont, dans les cas les plus graves, grossièrement tartinés de mortier noyant les moellons de meulière alors qu'il fallait soigneusement les rejointoyer, en léger retrait de la face vue, et nettoyer à la brosse humide les débords de mortier sur la pierre avant prise du mortier. 

Le laxisme des autorités chargées de l'urbanisme vis à vis de ces atteintes au bon goût et au respect du patrimoine, est fort surprenant,  alors qu'elles sont si pointilleuses sur bien des sujets ressortissant à leurs compétences, 

mur en meulière parfait
au 12 avenue Douglas Haig à Versailles

Un cas exemplaire de belle maçonnerie est visible au 12, avenue Douglas Haig à Versailles. C'est un mur de soutènement au pied d'un terrain en pente et il sert de mur de clôture à la propriété. L'appareillage et les joints sont parfaits. Il s'agit d'un ouvrage ancien, auquel la qualité de son exécution confère une bonne pérennité en plus d'un aspect esthétique irréprochable.

gros plan sur le jointoiement


Les photos suivantes illustrent la variété des murs en meulière, où le bon est plus rare que le mauvais. Par égard pour les propriétaires, les adresses ne sont pas indiquées. Les exemples sont rangés de haut en bas par qualité décroissante.

Versailles, correct


Le Chesnay, presque correct, mais pourquoi
un mortier couleur rose layette ?


Versailles, horrible rafistolage

Le Chesnay, horrible tartinage

Géologie et histoire

Pierre à meule, c’est là son origine, elle doit son nom à la fonction qui lui a été dévolue : cette « pierre à pain » est en effet celle des meules qui broyaient les grains de blé. On observe plus d’une quinzaine de faciès de roches sédimentaires siliceuses auxquels on a attribué le nom générique de meulière.

Exploités jusqu’à la fin du XIXe siècle environ, 206 sites d’extraction ont été recensés en France. Les blocs les plus denses, de couleur grise ou parfois blanche, jaune ou gris-bleu, étaient destinés aux meules, tandis que, plus en surface, les fragments rougeâtres ou ocre étaient retenus pour la construction.

La géologie spécifique de l’Île-de-France a donné à cette roche rugueuse et caverneuse une identité propre à notre habitat.

Les gisements du Bassin Parisien s’étendent de la Normandie jusqu’aux abords de Reims et d’Épernay, et se concentrent entre le Vexin, la Beauce, le Hurepoix et la Brie. Une véritable industrie s’était développée à La Ferté-sous-Jouarre en Seine-et- Marne, la capitale mondiale de la pierre meulière. Les meules extraites dans ses carrières avaient une dureté exceptionnelle et équipaient des moulins jusqu’en Nouvelle- Zélande ! La carrière des Molières a produit, estime-t-on, de 100 000 à 200 000 meules en sept siècles d’exploitation. Les meules de la région étaient acheminées jusqu’au port de Rouen pour être exportées par vaisseaux.

Cette roche dure et inaltérable est née d’une réaction physicochimique de cimentation au début de l’ère tertiaire : sur la couche des sables de Fontainebleau, le quartz s’est mélangé au calcaire déposé au fond du Bassin Parisien par l’alternance de la mer et des formations lacustres d’eau douce. Les pluies ont dissous le calcaire ne laissant que la silice, minéral courant le plus dur qui soit.

Du fait qu'elle est non gélive et résistante à l’érosion, on l’adopta très vite pour réaliser fondations et enrochements de ponts. La Belle Époque a signé l’avènement de ce matériau constitutif de villas bourgeoises. La roche était alors encore relativement abondante. en effet, les carrières de la région sont exploitées pour les pavés de grès mais elles doivent d'abord extraire les couches à meulière avant d'atteindre le grés.

Dans notre région, les traces de son usage remontent à quelques millénaires. Associée au calcaire et au grès, on retrouve la meulière dans les vestiges de tumuli de l’âge du Bronze. À la période antique, elle apparaît dans des aménagements de drainage observés à Saint-Pierre-du-Perray (91). On la trouve appareillée et maçonnée dans des monuments du second Moyen Âge, notamment les ruines de l’abbaye des Vaux de Cernay, des églises du XII siècle… Ses qualités esthétiques associées à d’autres matériaux sont mises en valeur à partir de la Renaissance pour souligner certains traits architecturaux.

Source : emprunt de passages de l’article de Patrick Blanc dans l'Echo du Parc [de Chevreuse] n°66 (juin 2015)

 









Aucun commentaire: