Les catastrophes
suscitent immanquablement des avis de grands experts sur ce qu’il aurait fallu
faire.
Cette affaire de la
plus haute importance qu’est l’actuelle pandémie de coronavirus ne déroge pas à
la règle.
Il est infiniment plus
facile - et surtout moins risqué - de s’ériger en censeur et donneur de
conseils lorsque l’histoire est déjà écrite, ses conséquences connues ou
partiellement connues, et qu’on peut tranquillement inventorier les erreurs
commises par ceux qui avaient à décider en indiquant sentencieusement les
corrections qui auraient conduit à un meilleur résultat.
Parmi les prophètes du
passé qui se pressent sur les plateaux, dans les studios et qui noircissent des
pages de journaux on trouve de tout : politiques pas toujours très connus,
professeurs de virologie et d’épidémiologie poussés après la pluie,
journalistes qui se copient les uns les autres. Leurs « Y’avait
qu’à » et « Fallait que » nous laissent la mandibule pendante tellement
nous admirons leur profonde clairvoyance. Comment ceux qui nous gouvernent ont-ils
pu négliger le concours de telles compétences ? Pour être honnête, on trouve
aussi de temps en temps des commentateurs sérieux et modestes.
Il est en revanche bien
utile de faire des investigations pour rétablir les faits. Ainsi, en 2011,
il y avait près d’un milliard et demi de masques : 600 millions de
masques FFP2 (pour les professionnels de santé) et 800 millions de masques
chirurgicaux (pour toutes les autres professions en contact avec le public :
chauffeurs de bus, policiers, caissières, éboueurs...). Cette année-là, Xavier
Bertrand est ministre de la santé et la France possède le plus gros stock
au monde.
En 2012, François Hollande s’installe à
l’Élysée. Marisol Touraine est nommée à la Santé. Et en 2013, le 16
mai exactement, le secrétariat général de La Défense et de la sécurité
nationale change la doctrine pour la protection des travailleurs. A noter que Jérôme
Samuel, actuel directeur de la santé, était à l’époque le conseiller de la
ministre Touraine. Tout bascule à ce moment-là. Le gouvernement de
Jean-Marc Ayrault décide alors que l’Etat ne s’occupera plus que des masques
fpp2 pour les professionnels hospitaliers, et qu’il abandonnera la
gestion des autres masques chirurgicaux aux employeurs des autres
professions en contact avec le public. C’est ce qui est écrit dans un
rapport du sénateur Francis Delatre. Au fil des années, le stock
stratégique a été utilisé sans avoir été renouvelé. C’est ce qui explique le
manque cruel de masques et la panique politique.
Une grande question n’est toujours pas tranchée :
faut-il réserver les masques aux personnes saines pour les protéger ou aux
personnes malades pour qu’elles n’infectent pas les saines ? Le problème
semble avoir été fabriqué de toutes pièces pour diminuer l'impact de la scandaleuse pénurie,
car il faut bien des masques pour tous. Si c’est pour tous il en faut plus. Quelques
pays prévoyants et disciplinés (Chine, Taïwan, Corée du Sud, Singapour, etc.) ont
procédé ainsi avec succès.
Enfin, bien que l’heure ne soit pas à la l'ironie et que le virus tue plus que le ridicule, que dire sur cette
lamentable pantalonnade de l’hôpital militaire de trente lits sous tente de
Mulhouse. Cela fait dix jours qu’on l’annonce pour le lendemain et il n’est toujours
pas opérationnel. A la télé on voit de gentils bidasses tourner en rond à la
recherche des piquets de tente. S’il y a une raison sérieuse, pourquoi ne pas
la dire ? La réputation de l’armée mérite mieux.
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